JORIS FRIGERIO
ÉCRITURE – MISE EN SCÈNE
Je fais souvent un rêve. Je vis dans un théâtre dans lequel se jouent des spectacles en permanence. Je peux les observer au loin et sentir l’émotion des spectateurs, entendre les rires, les applaudissements… C’est dire à quel point je suis attaché à ce lieu, à son ambiance et ses artifices, que j’aime depuis mon enfance. Le cirque m’a fait rêver très jeune, J’imitais les performances des artistes vus au Festival de Monte-Carlo.Mais c’est à 17 ans que la révélation a lieu lorsque j’assiste à une pièce de James Thierrée sur le grand plateau du TNN à Nice. Je découvre alors une forme que je n’avais encore jamais vue et qui réunit le théâtre, le cirque, la danse, en une seule entité artistique, d’art total du geste. Tout me semble clair et je décide de devenir circassien. Je me lance corps et âme dans la pratique du mains à mains, qui était pour moi, parmi les disciplines les plus pures de l’acrobatie. En suivant un cursus de professionnalisation dédié à cette pratique en intégrant le CNAC, je me suis senti plus que jamais à ma place. À présent, j’utilise le cirque comme un outil, qui peut agir sur plusieurs formes et sur des terrains multiples. Populaire par essence, c’est le vecteur parfait pour parler aux adultes et aux enfants en même temps. Mon expérience avec Guy Alloucherie, en prenant part à son travail en tant qu’interprète, m’a donné le goût d’aller interroger l’autre, de chercher l’intime, d’allier le cirque à une approche documentaire. Cette envie a grandi et s’est développée dans les projets de la compagnie. À cette attirance pour l’intime, s’ajoute un amour pour le cinéma, la photographie et le jeu de l’image sous plusieurs formes. Notre travail évolue, il tutoie avec certains projets le mouvement dansé tout en conservant son essence délicate et viscérale. La compagnie s’intéresse actuellement à la magie nouvelle et à la manière dont elle pourra conduire les spectateurs dans des univers surprenants. Par ailleurs, dans la vie je suis une personne assez inquiète, Je crois que si j’écris des pièces, c’est en premier lieu pour me rassurer sur la nature humaine. Il y a dans toutes les pièces une envie profonde de nous questionner sur les rapports humains, et sur nos comportements. Et donc, une vision politique et philosophique dissimulée, volontairement clandestine.